Il me semble qu’être une vieille âme, c’est faire preuve d’une sagesse supérieure à son âge, c’est avoir une attirance profonde pour les choses du passé et se sentir nostalgique de ne pas pouvoir vivre dans certaines conditions d’une époque révolue.

J’aime être une vieille âme.

Mais quand les gens se réfèrent à moi en tant que tel, je me demande s’ils ne font pas une mauvaise utilisation du mot. Car souvent, ce qui les pousse à m’attribuer cette étiquette, c’est le fait qu’ils me trouvent calme, à part, bien élevée et faisant preuve d’une maturité et d’un sérieux peu communs pour quelqu’un de mon âge.

Suis-je vraiment une vieille âme, ou n’est-ce que le résultat de mes réactions face à mes traumatismes ? Ou alors… est-ce une combinaison des deux ?

Je crois que je suis une vieille âme, mais je pense aussi qu’une partie de la personne que je suis n’est que le résultat de ses traumatismes; certaines parties de moi ne sont que des barrières érigées il y a très longtemps pour me protéger du monde extérieur.

Ado, j’avais pris l’habitude de dire que je suis une vieille âme dans un corps de jeune, souvent avec une pointe de mélancolie dans la voix.

Je réalise maintenant (et l’idée m’a traversé l’esprit à plusieurs reprises par le passé) qu'être calme, polie, solitaire et sérieuse a probablement été ma façon de traverser la vie tranquillement sans attirer l’attention sur moi. C'était ma façon d’éviter les conflits, et surtout, c’était le résultat de mon isolation constante dans ma petite bulle pour échapper à une réalité qui ne me convenait pas et qui m’était hostile.

Pendant que j’écris ces lignes, je me demande combien de personnes s’identifiant comme de vieilles âmes sont extraverties. Combien d’entre elles ont eu une jeunesse épanouie ? Combien ont rarement ressenti le besoin de s’isoler du monde extérieur ? Existe-t-il une corrélation entre l'étiquette vieille âme et un passé marqué d'un traumatisme quelconque ?

J’ai passé une bonne partie de ma vie à me sentir seule, et cela a duré si longtemps que j’ai fini par croire que je me complais dans la solitude. Qu’est-ce qui est vrai, et qu’est-ce qui ne l’est pas ?

Pour combler mon vide, je me suis créé un monde imaginaire fait de livres, de films et de rêveries. Ce calme apparent qui fait dire aux gens que je suis une vieille âme, n'est-ce pas plutôt qu'il ne reflète pas l’intense activité qu’il y a dans ma tête ?

Je n’ai pas voulu être cette personne qui doit souvent s’isoler afin de recharger, j’aurais parfois aimé prendre plus de plaisir à ce que font les autres de mon âge, mais… que de bons côtés il y a dans le fait d'être la vieille âme que je suis !

Ils trouvent que je suis une vieille âme, mais peut-être que j’en suis une (au sens où ils l'entendent) parce qu’il ne m’a pas été permis d'être jeune.


P.S. : L'illustration en couverture de cet article est une œuvre de @karayiib.